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Pièce 45671

PRÉSENTATION

Type

Pièce

Titre

L'Argument de la Comedie, aux lecteurs

Incipit

Non pas tousjours, on s'amuse en Vergile

Langue

Français

Genres

Argument (Vers)

Adresse au lecteur (Vers)

Statut fiche

Terminé


TRANSCRIPTION SCRIPTA MANENT

❧ L’argument de la Comedie, aux lecteurs

Non pas tousjours, on s’amuse en Vergile,
Ou es leçons du fidele Evangile ;
Non pas tousjours on prend plaisir aux vers,
De gravité veritable couverts :
Car quelque foys l’esprit bening et tendre,
Quelque leçon nouvelle veult entendre.
Cella je dy (ò benings lecteurs) pource
Que d’œuvres maints je veoy une grand’ source.
Aulcune foys remplis de verité,
Aulcunes foys de toute obscurité,
Dont les humains, cuydants proffit attraire,
Le plus souvent en font tout le contraire.
L’œuvre present est si bien compassé,
Qu’il represente Auteurs du temps passé,
Que l’on nommoit les Poëtes Comiques.
Terence, Plaute et aultres maints antiques
Telz ont esté : dont la fluente Muse
Des plus letrez, l’œil bien souvent amuse,
Quand en latin on lit la melodie
De plusieurs vers, compris en Comedie.
Mais les Françoys, Auteurs de ce temps cy,
N’ont point encor’ ce curïeux soucy,
De mettre au vent Comedie diverse :
Car leur esprit en aultre stille verse.
Ce qui m’a fait prendre papyer et plume,
Pour en trouver l’usage et la coustume,
À celle fin que du Françoys païs
Soyent desormais les aultres esbahis
Et que puissions les vieulx latins ensuyvre,
Qui par escript nous ont appris de vivre,
Où nous voyons desja que l’on s’applique
À enrichir le langaige Gallique,
Dont les Auteurs en ont louange entiere.
Or, pour suyvir de pres nostre matiere,
L’œuvre present Comedie sera,
Qui, des amours plaisantes, traictera
D’un escolier Erostrate nommé,
Filz d’un marchant en thesors renommé ;
Pareillement de dame Polymneste.
Afin que tout au vray je manifeste,
Cest Erostrate honneste et de renom,
Par son pere est transmis en Avignon
Estudier : qui si tost qu’il arrive,
Et que de l’eau il eut passé la rive,
Apperceut lors Polymneste la belle,
Fille à Damon, qui d’une ardeur nouvelle
Incontinent commença de le poingdre,
Dont il conclud à son amour atteindre.
D’Erostrate le nom il delaissa,
Et de son serf le tiltre il embrassa,
Nommé Dilippe : et dessoubz ce nom là
Bien longuement ses amours il cela
Avecq’ la belle, en passant son service
Avecq’ Damon, où la vieille Nourrice
Feut le moyen que la flamme s’appaise,
Qui les amants tenoit en grand malaise.
Finablement l’embusche est descouverte,
Dont l’amant est mis en prison couverte.
Son pere vient (de ce cas incertain)
En Avignon de son païs loingtain.
Le serviteur de son filz desguisé
Trouble le pere, et puis mieulx advisé
Le recongnoist : rendu joyeux d’entendre,
Qu’il estoit filz du grand docteur Cleandre.
Damon entend que ceste fiction
Le rempliroit de consolation ;
Reçoit le pere en liesse infinie
Et Erostrate à sa fille marie.
Les actes sont bien proportionnez,
Et proprement personnaiges donnez.
Brief, il y a invention bien grande,
Qui sa memoyre aux lecteurs recommande.
Oultre cella, deux Epistres verrez
Des deux amants : ausquelles trouverez
(Si les voulez lire d’un cœur avide)
Qu’elles sont pres de la phrase d’Ovide.
Bien esperant que chascun de vous die :
« Nous te devons Françoyse Comedie ! »

Fin de l’argument.

Source
Copiste

Claire Sicard


ATTESTATION (1 édition)

Liminaire dans Bourgeois Jacques, Comedie treselegante, en laquelle sont contenues les amours recreatifves d'..., Paris, Marnef Jeanne de (veuve Denis Janot), 1545, f. A iij r° - A iiij v°


POUR CITER CETTE FICHE

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Claire Sicard et Pascal Joubaud, Notice Texte 45671, Scripta Manent, état du : 03 avril 2025